Publié le 21 Décembre 2021
Même si certains rejetons de familles connues empruntent des voies toutes autres que leurs parents, il est parfois curieux de réaliser que certains suivent les traces de leurs prédécesseurs. Et on peut voir divers chanteurs, acteurs, journalistes, ou hommes et femmes politiques qui reprennent le flambeau déposé par leurs parents en faisant le même métier qu’eux. On peut alors se demander si cela ne rend pas plus facile de percer dans le monde du show business, ou même des affaires ou de la politique, quand on a des relations, et qu’on est tombé dans le chaudron quand on était petit.
Jésus s’ancre dans le temps des humains
Même si l’on ne peut pas faire une telle comparaison avec Jésus, on ne peut qu’être frappé par les premiers versets de l’évangile de Matthieu qui énumèrent toute une série de « fils de… », une généalogie qui remonte d’abord au roi David, et plus loin encore, à Abraham lui-même…
Cela ne veut pas dire, bien entendu, que la vie sera plus facile pour Jésus que pour d’autres parce qu’il se situe dans une lignée humaine connue. Nous savons que son ascendance plus ou moins glorieuse ne le protégera ni des attaques ni des persécutions en tous genres. Mais si l’évangéliste Matthieu a fait des recherches pour établir le plus fidèlement possible cette généalogie, c’est qu’il a une idée en tête. Il veut montrer que le petit enfant qui va naître ne se situe pas en dehors des familles humaines. Sa naissance s’inscrit dans une Histoire humaine précise. Jésus a des ancêtres connus qui ont parfois mal vécu mais qui, malgré tout, se situent dans le plan de salut de Dieu pour l’humanité dès les origines du peuple d’Israël.
Tout au long de son évangile, selon une méthode rabbinique fréquente à l’époque, Matthieu va donc ainsi citer des personnages ou des textes de l’Ancien Testament pour relier le présent au passé, qui s’éclairent ainsi mutuellement. C’est ainsi qu’il relie le ministère de Jésus à la première alliance, afin de montrer que les anciennes prophéties trouvent leur plein accomplissement en lui. C’est pourquoi, par la suite, les premiers chrétiens se considèreront comme les héritiers spirituels et comme les continuateurs de la foi des hébreux de l’ancien temps.
Jésus seul parfait issu d’une lignée d’hommes et de femmes imparfaits.
Cette généalogie, assez ennuyeuse si on la lit d’affilée, nous montre malgré tout que Dieu n’est jamais indifférent à ce que vit l’humanité qu’il a créée, et plus précisément le peuple qu’il s’est choisi. Si on prend chacun des individus cités dans cette généalogie, on voit des êtres humains comme les autres, imparfaits et aux actions parfois répréhensibles, mais malgré tout choisis par Dieu pour participer à son dessein de salut pour le monde. Certains sont juifs, d’autres pas, ce qui fait entrer dans la liste des ancêtres de Jésus quelques étrangères au peuple d’Israël. Et pourtant, par leur simple présence, par leur vie même, tous et toutes ont participé d’une manière ou d’une autre à la réalisation du plan de salut divin.
Jésus va donc naître à la suite d’une lignée composée de personnages disparates et imparfaits, symboles de cette humanité pétrie de défauts qui finira par le crucifier. Lui seul sera parfait, et n’aura rien à se reprocher, lui qui est justement venu sur terre pour sauver cette humanité de ses péchés. Et tout au long de son évangile, Matthieu va parler de cette perfection de Jésus, et de son rôle de Sauveur du monde, en mettant bout à bout tout un kaléidoscope de récits de sa vie, et en reprenant de nombreux extraits de ses enseignements, en commençant par cette généalogie qu’il veut symbolique.
Une généalogie à teneur hautement symbolique
Certains observateurs ont fait remarquer que cette généalogie semble incomplète voire inexacte. Serait-ce que Matthieu n’avait pas tous les éléments en main ou bien tout simplement qu’il voulait faire une démonstration théologique précise ?
On le voit en effet répartir sa liste en trois groupes d’individus, trois groupes de quatorze personnes. Comme chacun le sait, quatorze est le double de sept, et sept est le chiffre de la perfection par excellence dans la Bible. Nous voyons par là que la perfection de Dieu vient s’inscrire dans l’imperfection humaine, et donc la tirer vers le haut. C’est ainsi que Jésus, qui n’est pas fils de Joseph, mais fils de Dieu, en arrive à faire pleinement partie d’une famille humaine par le moyen de l’adoption.
Comme l’écrivait le pasteur J.P. Montsarrat, « Joseph, en adoptant Jésus comme Dieu le lui ordonne, lui donne cette famille-là. Famille bien mélangée que ces hommes et ces femmes, honorables ou peu recommandables, pieux ou impies, célèbres ou obscurs. En entrant dans cette famille, Jésus est pleinement entré dans notre condition humaine. Il devient solidaire de chacun. En acceptant cette famille-là, Jésus se fait aussi notre frère », notre guide, celui qui nous montre le chemin vers Dieu, et vers une vie meilleure, vers une existence plus fraternelle.
Anniel Hatton